HISTORIQUE DE PARIS-ROUBAIX
 
 

 

 

ROUBAIX, capitale lainière depuis très longtemps, devint également un centre cycliste à la fin du dix-neuvième siècle.

Deux hommes d'affaires, Maurice PEREZ et Théophile VIENNE, filateurs de leur état, firent construire à leurs frais un vélodrome au parc Barbieux. De nombreuses réunions s'y déroulaient et ils décidèrent en février 1896 d'organiser en plus, une course en ligne arrivant sur ce vélodrome.

Paris étant le lieu d'arrivée de grandes compétitions, ils choisirent judicieusement d'inverser le processus en y donnant le départ. Leur vélodrome aurait l'impact supplémentaire d'être lieu d'arrivée.

C'est Louis MINART, rédacteur en chef du célèbre "PARIS-VELO", secondé par Victor BREYER qui fut chargé de l'organisation. Le programme est copieux : 280 Kms de la Porte de Maillot à la piste roubaisienne en passant par Pontoise, Beauvais, Amiens, Doullens, Arras, Henin-Liétard et Lesquin. La formule est inspirée de Bordeaux-Paris, avec des entraîneurs humains en vélocipèdes, tandems, triplettes et même quadruplettes. Les prix sont importants : 1 000 francs au premier soit plus de cinq fois le salaire mensuel moyen d'un ouvrier.

19 avril 1896 : 48 internationaux et 6 "lillois" prennent le départ à 5 heures et 5 minutes par un temps superbe. Les principaux favoris s'appellent Maurice GARIN, l'Allemand FISCHER, Paul GUIGNARD et les frères LINTON. A l'arrivée, c'est l'un d'eux qui l'emporte : Joseph FISCHER avec 36 minutes d'avance. Il ne doit pas réaliser qu'il vient d'inaugurer le palmarès d'une des plus prestigieuses épreuves sportives. Pour cette première édition, le succès est complet, des dizaines de milliers de spectateurs sont présents sur le parcours.

1897 et 1898 : Maurice GARIN, roubaisien d'adoption, prend l'avantage. C'est l'un des plus grands champions de l'époque héroïque.

1907 : PASSERIEU a la surprise d'être arrêté à l'entrée du vélodrome par un gendarme irascible qui désire absolument voir la plaque prouvant qu'il a bien réglé l'impôt sur sa bicyclette. C'est également cette année-là qu'un belge monte pour la première fois sur le podium. Il s'agit de Cyrille VAN HAUWAERT, qui confirme l'année suivante en emportant la "Pascale".

1909 : Commencement de la suprématie du jeune Octave LAPIZE, 20 ans. Il triomphe de trois éditions consécutives et sera l'un des champions le plus complet de sa génération.

1912 : Les spectateurs ont le privilège de voir arriver pour la victoire trois champions… dont deux roubaisiens : Charles CRUPELANDT et Maurice LETURGIE. Une chute écarte le pauvre LETURGIE du sprint où CRUPELANDT n'a pas de mal à régler le sort de GARRIGOU.

1919 : Henri PELISSIER signe sa première victoire. Il récidivera en 1921 devant son frère Francis, après une course fantastique.

Entre 1920 et 1939 les Belges reviennent en force avec les premières places de Paul DEMAN, Albert DEJONGHE, Jules VAN HEVEL, Félix SELLIER, Julien VERVAECKE, Romain GIJSSELS, Sylvère MAES, Lucien STROME, Émile MASSON, sans oublier le triplé du "bouledogue" Gaston REBRY. Il faut y ajouter le succès du Suisse Henri SUTER en 1923 avec au départ 389 coureurs. C'est du reste toujours le seul Helvétique au palmarès. Le cyclisme français des années 30 est florissant avec des champions comme André LEDUCQ, Antonin MAGNE, Georges SPEICHER, Charles PELISSIER, Jean MARECHAL, Roger LAPEBIE, Marcel BIDOT et bien d'autres. Malgré la domination belge, André LEDUCQ l'emporte en 1928, SPEICHER en 1936 et Jules ROSSI en 1937. Il arrive en solitaire mais les commissaires le déclassent à cause d'une faute douteuse : un accrochage avec Julien VERVAECKE fait tomber ce dernier. MARECHAL est rétrogradé à la deuxième place.

1934 : Le jeune Champion de France, Roger LAPEBIE, domine l'épreuve et gagne à Roubaix. Il est cependant déclassé lui aussi car il termine la course sur un vélo d'emprunt. Echappé près du but avec Gaston REBRY et Jean WAUTERS, il crève. La voiture de son directeur technique est trop loin pour le dépanner et il emprunte alors le vélo d'un spectateur, revient sur les deux belges et les distance aussitôt. Gaston REBRY remporte la course sur tapis vert, au désappointement des spectateurs qui ne reconnaissent que Roger LAPBIE comme vainqueur.

1935 et 1936 : L'arrivée de la course se fait à l'hippodrome des Flandres de Marcq-en-Baroeul, un conflit avec la ville de Roubaix ayant éclaté.

Copie de l'assignation de Maître Paul Gaillard, huissier à Roubaix contre le journal "l'Auto" du 3 avril 1935 pour défendre celui-ci d'utiliser le nom de Paris-Roubaix pour la 36° édition qui arrive à l'hippodrome des Frandres du Croisé Laroche à Marcq-en-Baroeul. (document archives municipales)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1936 : En dépit de conditions climatiques difficiles, l'épreuve se déroule normalement jusqu'à l'hippodrome du Croisé Laroche où Romain MAES devance Georges SPEICHER et Gaston REBRY au sprint. Les spectateurs belges exultent après une nouvelle victoire d'un compatriote. Leur joie est de courte durée, tous ont vu MAES l'emporter mais les juges à l'arrivée classent SPEICHER premier. Romain MAES n'aura plus la chance de pouvoir gagner par la suite.

1939 : Emile MASSON, remporte le dernier Paris-Roubaix avant les hostilités devant Marcel KINT et Roger LAPEBIE après une course superbe. Quelques jours plus tard, il est mobilisé.

1949 : C'est de nouveau l'imbroglio : deux coureurs remportent la victoire ex-aequo. A proximité de l'arrivée, André MAHE, Jésus MOUJICA et Frans LEENEN s'échappent mais sont mal aiguillés par un agent du service d'ordre. Les trois malheureux fuyards entrent au vélodrome par le mauvais côté ! Le robuste André MAHE passe la ligne en tête. Serge COPPI, le cadet de Fausto, gagne le sprint du peloton. Après de longues palabres et quelques jours, la fédération décide de ne léser personne en lassant MAHE et COPPI premiers ex-aequo.

1950 : La rivalité Fausto COPPI – Rik VAN STEENBERGEN est à son apogée. COPPI décide de marquer un point décisif en s'échappant à la sortie d'Arras. Il écrase la course de toute sa classe. Après un raid solitaire de 50 Kms face à des adversaires comme VAN STEENBERGEN, MAGNI, BOBET, il arrive sur l'anneau roubaisien avec près de trois minutes d'avance sur son dauphin Maurice DIOT qui se contente de dire : "J'ai gagné Paris-Roubaix, COPPI était hors-concours". Il n'a pas tord.

1956 : Louison BOBET attendu depuis quelques années, inquiet comme souvent, dompte la course. Il gagne devant DE BRUYNE qui se vengera douze mois plus tard.

1958 : Jacques ANQUETIL prend le départ pour gagner. En grande condition, il roule en tête toute la journée… jusqu'à 13 Kms du but où il crève, la meute des poursuivants rejoint les échappées à HEM. Un sprint royal est lancé et Léon VAN DAELE l'emporte devant POBLET, VAN LOOY, VAN STEENBERGEN, DE BRUYNE… excusez du peu ! Les succès belges continuent de plus belle avec Noël FORE en 1959, Pino CERAMI en 1960 à 38 ans malgré une excellente prestation de Tom SIMPSON. Puis arrive Rik VAN LOOY attendu lui aussi depuis longtemps. Il réalise le doublé en 1961 et 1962 avant de récidiver en 1965 égalant ainsi LAPIZE et REBRY trois fois victorieux. Nouvelles arrivées au sprint en 1963 et 1964 qui permettent à Emile DAEMS et Peter POST qui excellent dans le domaine, de remporter un succès prestigieux.

1966 : Retour en force des Italiens sous un ciel bas. Félice GIMONDI offre un récital et devance le Néerlandais Jan JANSSEN de plus de quatre minutes. Après deux places sur le podium en 1963 et 1966, Jan JANSSEN prend le départ en 1967 pour gagner… et il gagne après un fabuleux sprint où il règle VAN LOOY, ALTIG… et un certain Eddy MERCKX. L'hégémonie belge ne sera plus ensuite entravée avant dix ans. MERCKX s'affirme avec le maillot arc-en-ciel sur les épaules en 1968. Il devance facilement VAN SPRINGEL au sprint, le dernier qui a pu lui résister. Walter GODEFROOT s'impose ensuite après un long duel avec l'inévitable MERCKX. A noter qu'en cette année 1969, un néophyte du nom de DE VLAEMINCK termine cinquième. On en reparlera…

1967 : Création de Paris-Roubaix amateurs dont la première édition est remportée par le Belge Georges PINTENS, la deuxième en 1968 par le nordiste Alain VASSEUR.

1970 : MERCKX, encore MERCKX. Il survole la course sous le déluge malgré tous ses adversaires et devance Roger DE VLAEMINCK de plus de cinq minutes. Roger ROSIERS, robuste routier flamand le suit au palmarès avant le premier succès de Roger DE VLAMINCK en 1972. L'épreuve a trouvé un nouveau maître : quatre victoires en six ans, il devient le recordmen et "Monsieur Paris-Roubaix".

1973 : Eddy MERCKX est de nouveau intouchable et signe son troisième triomphe, rejoignant ses illustres aînés LAPIZE, REBRY et VAN LOOY.

1977 : Pour la première fois, le vainqueur de Paris-Roubaix reçoit comme trophée un pavé monté sur socle offert par le Vélo-Club de Roubaix, relayé à partir de 1981 par l'association "Les Amis de Paris-Roubaix", et ce pour la quatrième et dernière victoire de Roger DE VLAEMINCK.

1978, 1979 et 1980 : On assiste à un triplé extraordinaire de l'Italien Francesco MOSER. Toujours présent aux avants postes depuis 1974, année où il échoue à la deuxième place pour sa première participation. A signaler qu'en 1980, un Français monte sur le podium pour la première fois depuis 1960, il s'agit du Béarnais Gilbert DUCLOS-LASSALLE. Il récidivera en 1983 en prenant de nouveau le premier accessit. Toujours en 1980, l'Irlandais Stephen ROCHE enlève l'épreuve réservée aux amateurs.

1981 : La France attend un successeur à Louison BOBET depuis 25 ans ! Bernard HINAULT est Champion du Monde, il est attendu de tous sur les pavés de Paris-Roubaix qu'il n'aime pas. Il est ce jour-là invulnérable. Puissant, il lance le sprint en tête sur le vélodrome roubaisien. DE VLAEMINCK n'arrive qu'à la hauteur de son pédalier, MOSER est troisième. Deux Néerlandais le suivent au palmarès avec des succès totalement justifiés : Jan RAAS en 1982 et Hennie KUIPER en 1983 malgré une crevaison à Hem. Sean KELLY, toujours présent touche au but en 1984 et 1986 : il est le meilleur coureur dans les classiques des années 1980, son succès relève de la logique. A noter en 1984 la très belle troisième place du hémois Alain BONDUE qui aurait préféré traverser sa ville en tête mais les circonstances de course l'ont empêchées de réaliser son rêve.

1985 : Superbe victoire pour un autre Français : Marc MADIOT, qui rappelle ainsi son succès chez les amateurs en 1980. Il s'envole sur les pavés, devançant son équipier nordiste, Bruno WOJTINEK, Marc MADIOT qui double la mise en 1991 devant un autre Français, Jean-Claude COLOTTI.

1989 : Pour la première fois est organisée le Paris-Roubaix VTT. Cette épreuve en plusieurs étapes perdurera jusqu'en 2003. Le Belge Pol HERIJGERS inscrira quatre fois son nom au palmarès.

1992 et 1993 : Après une persévérance exemplaire, doublé de Gilbert DUCLOS-LASSALLE, la première fois en solitaire, la seconde d'un boyau sur l'Italien Franco BALLERINI qui s'adjurera l'épreuve en 1995 et en 1998. Un secteur pavé porte maintenant son nom à Cysoing.

1995 : Le Français Damien NAZON enlève la dernière édition du Paris-Roubaix "Amateurs" qui sera remplacé désormais par l'épreuve des "Espoirs" (coureurs âgés de 19 à 22 ans).

1996 : Après sa troisième place l'année précédente, Johan MUSEEUW signe sa première victoire pour l'édition du centenaire. Le "Lion des Flandres" coupera également la ligne en tête en 2000 et en 2002 qui marque la centième organisation de la reine des classiques. Que de symboles !

1997 : Frédéric GUESDON offre à la surprise générale la dernière victoire française à ce jour, surprise relative pour les connaisseurs car il avait terminé deuxième chez les amateurs en 1994.

1999 : L'Italien Andrea TAFI monte enfin sur la première marche du podium suite à sa troisième place de 1996 et à la deuxième un an plus tôt.

2003 : Naissance d'une épreuve pour les Juniors "Le Pavé de Roubaix". La première édition est remportée par Anthony COLIN devant le sociétaire du V.C. Roubaix David DEROO.

2004 : Après l'éclatant succès de Peter VAN PETEGEM en 2003, Johan MUSEEUW s'élance de Compiègne pour égaler le record de Roger DE VLAEMINCK. Malheureusement pour lui, il échoue pour sa dernière participation, ce qui permet à Magnus BACKSTEDT de devenir le premier suédois à inscrire son nom au palmarès de la course de légende qu'est Paris-Roubaix.

2005 : Déjà troisième en 2000 dans la course "Espoirs" et en 2002 chez les pros, le jeune belge âgé de 24 ans Tom BOONEN signe une superbe première victoire dans la Reine des Classiques, victoire qui en appelle d'autres...

2006 : Le suisse Fabian CANCELLARA remporte en solitaire la Reine des Classiques 83 ans après son compatriote Henri SUTER. Ses trois poursuivants sont déclassés pour avoir franchi un passage à niveau qui était fermé, Tom BOONEN se retrouve de ce fait deuxième. D'autre part, Le Pavé de Roubaix devient Paris-Roubaix Juniors pour sa quatrième édition.

2007 : Rescapé de l'échappée matinale composée de 34 coureurs, l'Australien Stuart O' GRADY réussit l'exploit de terminer en solitaire sur le vélodrome après avoir faussé compagnie à ses derniers adversaires à 25 Kms de Roubaix.